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03 Aug

Lisbonne-Porto : le duel

Publié par Marion Morellato  - Catégories :  #Carnets de Voyage

Avant de partir au Portugal, j'ai lu beaucoup de choses sur la rivalité entre les deux principales villes. Rivalité qui va, selon Le Routard, jusqu'à refuser d'utiliser le même terme pour désigner un café expresso (Uma bica à Lisbonne, um cimbalino à Porto). Ayant passé 3-4 jours dans chacune des villes, j'ai essayé de les comparer du point de vue d'une touriste.

 

Visuellement, les deux villes se distinguent l’une de l’autre, sans être radicalement différentes. On trouve des azulejos à Lisbonne, et du fer forgé à Porto. La capitale portugaise arbore fièrement ses azulejos, pour tous les goûts et toutes les couleurs : elle se veut sincère, transparente. Ce qu’elle montre aux touristes, c’est son identité la plus pure. Loin d’être relégués au statut de folklore local entretenu pour le plaisir des étrangers, les azulejos se retrouvent partout, même dans les rues les moins passantes. Du côté de Porto, les façades se revêtent de couleurs plus sombres mais non moins chatoyantes, et de balcons en fer forgé. On n’y trouve des azulejos que ponctuellement, dans le centre touristique et sur les grands monuments (églises, gare ferroviaire etc.).

Lisbonne-Porto : le duelLisbonne-Porto : le duel
Les azulejos de Porto : à l'intérieur de la gare (Estação Bento), et sur la praça da Batalha (Igreja de Santo Ildefonso)
Les azulejos de Porto : à l'intérieur de la gare (Estação Bento), et sur la praça da Batalha (Igreja de Santo Ildefonso)

Les azulejos de Porto : à l'intérieur de la gare (Estação Bento), et sur la praça da Batalha (Igreja de Santo Ildefonso)

Chacune a donc sa spécialité et entretient une atmosphère spécifique. Lisbonne est plus policée, plus propre, plus habituée au tourisme. Elle sait se montrer sous son meilleur jour en permanence. La capitale historique du Portugal entend maîtriser son image et prouver sa position centrale dans les affaires nationales. Chez elle, même les rues les plus mal en point semblent faire partie du folklore. 

En haut de la Rua São Lázaro (près de la Praça Martim Moniz)

En haut de la Rua São Lázaro (près de la Praça Martim Moniz)

Sur le plan de l’architecture comme des habitations, Lisbonne se plaît à mélanger harmonieusement le tourisme et le local. L’Alfama, cité par tous comme étant l’âme de la ville, est envahie par les touristes de jour, et par ses habitants de nuit. En soirée, à l’heure où les premiers prennent place dans un restaurant indiqué par leur guide comme le meilleur fado du coin, les seconds reprennent leurs droits. Ici, des Lisboètes improvisent une scène et branchent les enceintes de leur ordinateur pour danser divinement une bachata jusqu’au bout de la nuit. Là, on retrouve les habituelles personnes âgées, recroquevillées sur leur canne et tirant un cabas plein de nourriture, grimpant les rues avec peine pour regagner leur domicile. Il faut dire que Lisbonne s’est construite sur sept collines, tout comme Rome. Et si l’on s’en tenait l’inclinaison de ses routes et au sport qu’elle oblige à faire quotidiennement, elle mériterait sans doute cette appellation, bien plus que Rome. Quoi qu’il en soit, cette belle harmonie permet au touriste discret d’entrevoir facilement la richesse de la vie de quartier.

Dans un petit square de la Rua São Marçal (Lisbonne)Dans un petit square de la Rua São Marçal (Lisbonne)
Dans un petit square de la Rua São Marçal (Lisbonne)

Dans un petit square de la Rua São Marçal (Lisbonne)

Une partie de baby-foot sur la Praça Martim Moniz (Lisbonne)
Une partie de baby-foot sur la Praça Martim Moniz (Lisbonne)
Une partie de baby-foot sur la Praça Martim Moniz (Lisbonne)

Une partie de baby-foot sur la Praça Martim Moniz (Lisbonne)

Porto, sa grande rivale, paraît beaucoup plus fraîche, jeune, authentique. Mais aussi schizophrène. Le tourisme de masse y est arrivé récemment. Les Portuans ne se lasseront pas de vous vanter les bienfaits des compagnies aériennes low-cost qui viennent seulement d’ouvrir des lignes directes de Porto vers les capitales européennes – cause principale de l’explosion du tourisme dans la zone. La ville ne s’est pas encore adaptée. Les habitants fuient les touristes envahisseurs – il a été difficile de photographier des Portuans sur le vif, dans la rue – et les accueillent à bras ouverts. La ville se rénove, se nettoie, réhabilite son centre, mais nombreux sont encore les immeubles délabrés, sur le point de s’écrouler. Et les deux images de la ville cohabitent tant bien que mal.

Lisbonne-Porto : le duelLisbonne-Porto : le duel

 Ici non plus, aucun folklore. Telle une femme que l’on surprendrait avant qu’elle n’ait fini de se maquiller, Porto se présente à nous dans un naturel qu’elle s’emploie à masquer au plus vite. Mais finalement, cette authenticité qu’elle peine à masquer, c’est précisément ce qui fait son charme.

 

Le street art donne aussi un bon aperçu de l’état d’esprit des deux villes. Les graffitis, tags et autres peintures murales y expriment des messages bien distincts. Le long des docks lisboètes, en direction de Belém, on trouve une série de dessins au trait agressif, provoquant.

Lisbonne-Porto : le duel

Si l’on va dans le sens opposé, vers le Parque das Nações, ce sont des œuvres plus calmes, au style épuré.

Lisbonne-Porto : le duel

En comparaison, Porto fait figure de pays merveilleux. Certains artistes ont parsemé ses rues des mêmes personnages reproduits à l’infini : un chien qui rit, des visages amoureux, de petits oiseaux. Les stores des magasins de la Rua das Flores sont recouverts de motifs floraux et printaniers. Et aussi surprenant que ce soit, ces œuvres se marient toujours parfaitement avec le paysage alentour.

Lisbonne-Porto : le duel
Lisbonne-Porto : le duel
Lisbonne-Porto : le duel
Lisbonne-Porto : le duel
Lisbonne-Porto : le duel
Lisbonne-Porto : le duel

Finalement, dans les yeux des touristes, la rivalité entre Lisbonne et Porto n’a pas vraiment de sens : elles ne sont tout simplement pas comparables. Lisbonne est bien installée dans l’âge mûr. Elle a trouvé son harmonie, elle sait se dévoiler et être sincère sans trop en montrer. Juste assez pour faire rêver les voyageurs mais pas assez pour les choquer. Porto, à l’inverse, est dans l’adolescence, elle bouillonne, s’enthousiasme de tout, change et se rénove. Je vous laisse deviner où va mon coup de cœur !

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A
Très réussi, tant au niveau du texte que des photos ! J'adore les impressions de mouvement sur certaines de tes photos...
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M
Texte et photo font un bon binôme... pour nous donner envie de découvrir le Portugal !
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M
Merci Messergaster !<br /> Contente que cette première tentative soit réussie
L
Hyper interessant, très belle plume et de belles photos ! (Un coup de coeur pour le cliché du chien)
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M
Merci !! :)
O
super concept de photo-reportage où l'histoire et les photos valent le détour!
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M
Merci Olivier ! J'ai fait un test, mais c'était dur d'oser me lancer. Difficile d'évaluer l'intérêt de mon texte...

À propos

Photographe novice mais passionnée en quête d'inspiration et d'expression...